Les gravures dans les livres anciens et les estampes : qui fait quoi ?


gravure
gravure dessinée par Jean-Baptiste de Champagne et gravée par Gérard Edelinek

On rencontre souvent des gravures (sur cuivre principalement) dans les livres anciens soit placées en frontispice soit en regard dans le texte, soit sur des planches dépliantes. Certaines gravures sont anonymes, d’autres portent le ou les noms de leurs auteurs, la gravure faisant intervenir plusieurs acteurs depuis le milieu du 16e siècle. Ces indications sont valables aussi pour l’estampe qui peut être signée elle aussi.

Graveurs et  libraires peuvent se rejoindre pour une commande, le libraire commandant une suite de gravures, ou comme client. Les graveurs anversois proposent ainsi des formats adaptés aux livres qui sont susceptibles d’intéresser les libraires. Mais les imprimeurs et marchands en taille-douce et de l’autre les imprimeurs en lettres se distinguent notamment après une sentence prononcée le 12 octobre 1650. Les imprimeurs en taille-douce ont défense de réaliser des images avec des textes de plus de 6 lignes ou « dont la légende passerait au revers de la figure » (Source : Le commerce des estampes…)

Voici en tout cas une petite liste d’abréviations utilisées (en latin) pour vous aider :

Inv. , I. (en latin : invenit) : inventeur du motif

Del., delvt., del., de., d. (en latin delineavit) : le dessinateur

Pinx. (en latin pinxit) : le peintre

Sculp. (en latin sculpsit) : le graveur. On trouve aussi inc. (incidit), sculpsit, caelavit, fecit, fec., lith. (cela fonctionne aussi pour les estampes)

Exc. ( en latin excudit) : éditeur. Il est propriétaire de la planche et libre de la reproduire

Dir. (en latin Direxit) : le directeur de l’atelier.

En ce qui concerne la gravure qui vous est présentée elle est extraite du livre suivant :

L’Ecclesiaste de Salomon traduit en françois. Avec une explication tirée des SS. Peres, & des Auteurs ecclesiastiques. Paris : Chez Pierre le Petit, 1681

Cette gravure porte l’inscription suivante : « Tout fuit sous le soleil, l’homme n’est que mensonge, Dieu seul est vérité »‘.

Un ange est représenté avec le bras levé désignant Dieu au dessus du soleil. Au sol on trouve une corne d’abondance, deux couronnes, des os et une tête de mort, le tout emporté par un cours d’eau. Un feu couve et on voit en arrière plan un château qui se décompose. L’ange porte une écharpe portant l’inscription : « sub sole vanitas, supra sole veritas » (Vérité au-dessus du soleil, vanité au-dessous) avec pour signature Paulin. Il s’agit de Saint Paulin de Noe, évêque contemporain de St Augustin.

La gravure a été aussi publiée en estampe comme le montre ce passage intitulé

« un ange volant » :

« Ange planant au dessus d’un torrent dans les eaux duquel roulent une corne d’abondance des couronnes royales et des ossements. Il montre d’une main le soleil et la gloire de Dieu qui brillent au haut. On lit sur sa draperie : Sub sole vanitas Supra sole veritas Paulin et dans la marge : Tout fuit sous le soleil l’homme n’est que mensonge Dieu seul est vérité J. B. de Champagne del G Edelinck sculp. Le peintre-graveur français, ou Catalogue raisonné des estampes gravées par les peintres et les dessinateurs de l’école française, ouvrage faisant suite au Peintre-graveur de m. Bartsch Par Alexandre Pierre F. Robert-Dumesnil, Johann Adam B. von Bartsch

Gérard Edelinck fut un important graveur et eut une production nombreuse. Jean-Baptiste de Champagne, quant à lui, fut un peintre flamand du 17e siècle qui a laissé quelques oeuvres importantes pour des églises, aux Tuileries ou à Versailles.

Sources :

Histoire et pouvoirs de l’écrit / Henri-Jean Martin. Paris : Albin Michel, 1994 (Bibliothèque de l’évolution de l’humanité)

Le commerce de l’estampe à Paris au XVIIe siècle / Marianne Grivel. Genève : Droz, 1986.

Léo Mabmacien

3 réflexions au sujet de « Les gravures dans les livres anciens et les estampes : qui fait quoi ? »

  1. Bonjour et merci pour votre article ! Savez-vous à quoi fait référence l’abréviation « dir. » ? Je la rencontre sur certaines gravures d’une série d’une douzaine de pièces. Le dessinateur est toujours mentionné, mais cette abréviation s’alterne avec celui du graveur. Merci d’avance.

  2. Bonjour,
    Cela renvoie à « direxit », c’est à dire le directeur de l’atelier. Je vais le rajouter dans l’article. Merci à vous
    Léo

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